Chapitre 3

— Eclaire encore un peu plus à gauche, dit Eric. Lénick dirige la lumière de la lampe de poche du côté indiqué.

— Là, Lénick, je pense qu'il faut aller par là.

En effet, dans la clarté incertaine, les enfants distin­guent vaguement une sorte de plate-forme à six, sept mètres au-dessus d'eux.

— Je ne pense pas que l'eau remonte jusque-là. Allons-y! L'escalade n'est pas facile. La lumière est trop faible pour montrer toutes les difficultés du terrain. Les pieds et les mains glissent sur les pierres humides et couvertes de mousse. Mais ils avancent, ils montent, ils s'éloignent de l'eau qui va bientôt remplir la grotte, ils sentent en-dessous d'eux cette présence menaçante. Finalement ils arrivent à l'endroit voulu. Ils sont fatigués. Peut-être pas tellement à cause de l'effort physique mais plutôt a cause de la peur de ne pas trouver d'endroit sûr.

Les pierres sur lesquelles ils s'asseyent, leur parais­sent plus sèches que celles d'en bas et elles ne sont pas couvertes de mousse. Ils ont nettement l'im­pression que l'eau ne va pas arriver jusque-là.

— Et maintenant il faut attendre, Lénick.

— Oui, ça va durer longtemps.

— Douze heures au maximum. L'eau a besoin de six heures pour monter et de six heures pour redes­cendre.

— Peut-être un peu moins.

— Oui, c'est possible.

— Nos parents vont être inquiets.

— Sans aucun doute.

— Ils vont sûrement avertir la police si on ne rentre pas à temps.

— Ce sera notre fête!

— Tu peux bien le dire.

— Papa sera furieux et maman va pleurer. Mais il n'y a rien à taire! Pour le moment on peut seulement attendre la prochaine marée basse. La patience peut nous sauver.

— Il y a un autre problème, Eric.

— Oui, lequel?

— Les piles de la lampe ne vont pas tenir le coup pendant dix ou douze heures.

— Oui et retrouver le chemin dans l'obscurité com­plète ne doit pas être facile.

— 11 faut économiser.

— Tu veux dire éteindre la lumière?

— On peut toujours essayer et chaque fois qu'on a trop peur on rallume un instant.

— Alors, essaye un peu.

Lénick éteint la lampe de poche. Immédiatement une obscurité complète s'installe autour d'eux.

— Tu es toujours là, Lénick?

― Oui, ici, donne-moi la main!

— Rallume!

La lumière jaillit.

― Qu'est-ce qu'il y a, Eric?

— Je veux m'installer mieux.

Il regarde autour de lui.

— Là, contre ce rocher. On va se mettre l'un près de l'autre pour avoir moins froid.

Ils se déplacent. En effet, l'endroit est un peu plus confortable. Ils ne sont pas trop mal installés. Dans l'obscurité le temps passe lentement.

— Tu n'entends rien? demande Eric tout bas. Les deux enfants écoutent.

Le silence dans la grotte n'est pas complet.

— Je crois entendre l'eau qui monte.

— Oui, cela aussi, mais il y a autre chose. Ecoute bien! Le voilà.

Comme dans un souffle qui se renforce puis s'af­faiblit, ils entendent une voix qui répète: «Ayez pitié, ayez pitié, ayez pitié, ayez . ..».

— C'est le fantôme, murmure Lénick. Elle sent des frissons dans le dos.

— Oui, c'est le fantôme, dit Eric, je l'entends clai­rement.

A peine ont-ils prononcé ces mots qu'une lumière s'allume devant leurs yeux comme une flamme bleu pâle qui sort des rochers.